22.10.05

Turin, manifestation











“Samedi, début d’après-midi, à deux pas de Porta Palazzo. Dehors, les forces adverses se mettent en place, les policiers en uniforme dont beaucoup portent des lunettes de soleil (noires), les policiers en civil, souriants comme avant une partie de chasse et les manifestants, très jeunes pour la plupart, couleurs sombres, piercing, inscriptions, sacs à dos, dreadlocks, badges, casquettes, téléphones portables, cagoules, chaussures de sport, drapeaux noirs – pâles. A l’intérieur du Caffè Roma, deux d’entre eux – les yeux cernés, beaux, las (ceci a lieu en 2005) – boivent un café en silence tandis que les flics en civil – élégance fasciste, couleurs d’automne – discutent avec animation en buvant le leur. Les employés du Caffè Roma s’agitent servilement pour les forces de l’ordre.
‘Sans trêve, contre les dépotoirs et les villes-prisons. Pour une ville vivante, libre et solidaire, à l’assaut de l’Olympe. Cortège national.’ pouvait-on lire sur les affiches placardées dans les rues de Turin. Une longue heure d’attente avant le départ – la routine. Je traîne un moment près des manifestants puis j’ai envie de prendre une photographie, de loin. Je traverse le Corso Giulio Cesare et me poste face à la foule. Je prends une photo. Je vois deux personnes qui traversent, ils me regardent, je ne comprends pas de suite qu’ils se dirigent vers moi. Une fille et un garçon. C’est elle qui me bouscule violemment et m’arrache mon appareil photo des mains. Je le lui reprends, elle vocifère des mots que je ne comprends pas, puis fait demi-tour sans me laisser le temps de lui parler. Deux hommes se tiennent à l’écart, observent la scène. Ils ont deux énormes appareils photos avec des téléobjectifs. Il y a aussi les habitants du quartier, des Arabes, qui regardent tout ça, curieux et amusés.”
(cahier Turin, in Le Purple Journal, n°7, printemps 2006)